Belle Barcelone,
D’aussi loin que je me souvienne, je crois que toi et moi étions faites pour nous rencontrer. Déjà, sur les bancs de l’école, je trépignais d’impatience à l’idée d’apprendre l’Espagnol (ce qui finalement m’aura posé quelques problèmes, parce que toi tu parles surtout le catalan). L’enseignement offrait la belle récompense de pouvoir plus tard partir à ta rencontre en voyage scolaire. Voilà comment ajouter encore plus de motivation.
J’avoue qu’un voyage entre copines laissent plus de place aux rires qu’au tourisme. Je me souviens du Port et de Cricri avec son doigt pointé vers l’horizon (et dire que depuis toute petite on me dit que ce n’est pas très poli …). Je me souviens des ruelles et du Musée Picasso qui m’avait semblé durer une éternité (oui à cet âge on pense que nous aussi on aurait pu devenir riche et célèbre en peignant des formes géométriques, d’ailleurs nos cahiers sont des œuvres d’art à eux seuls…). Je me souviens de la mer et de ce temps doux pour un mois d’avril malgré un petit vent persistant. Je me souviens des consignes de maman « ne prends pas que tes copines en photos, prends le paysage ! » (oui, le numérique n’existait pas encore à cette époque – mode dinosaure). Alors je me vois m’appliquer pour lui rapporter quelques jolies photos. Je me souviens de notre hôte, petite femme blonde décolorée et accueillante et de ce sentiment si particulier quand on arrive dans un pays et qu’on ne comprend rien à ce qu’il se dit (oui, il y a quand même une différence entre l’accent de ton prof, et les locaux et leur vitesse d’élocution … !). Je me souviens m’être trompée de porte en voulant rentrer chez notre hôte, essayant tant bien que mal de forcer la porte d’une inconnue donc, qui se montra finalement aussi surprise que nous. Je revois encore notre petit bout de femme nous demander « combien voulez-vous de sandwiches pour votre départ ? » et me rendre compte une fois dans le bus retour, que le sac pèse une tonne et alors comprendre qu’il avait dû y avoir un malentendu entre « dos » et « doce » … Je me revois heureuse de retrouver les miens mais me précipiter sur le téléphone pour remercier à nouveau cette femme dans un élan déjà bien nostalgique.
Je me souviens avoir attendu pour te revoir … Avoir attendu longtemps … Des années … 6 ans pour être exacte. 6 longues années où malgré les découvertes, j’espérais finalement revenir à toi. Et je me souviens de l’excitation et de la joie dans laquelle j’étais lorsque 6 ans plus tard je tenais enfin mes billets d’avion dans la main. Très nerveuse (ce n’était que mon deuxième vol et je n’étais franchement pas très rassurée … Je fais partie de ceux qui pensent toujours au « Mais si l’avion …. ») et tellement impatiente ! Je me souviens de la chaleur que tu nous avais réservé ! Qu’il faisait chaud ! Et de ce meilleur ami un peu fou (mais qui avait finalement tout compris), qui nous a fait crapahuter partout sous un soleil de plomb autorisant tout de même une sieste l’après-midi. Je me souviens de toutes les découvertes de ce séjour. Cette fois, je n’étais plus une enfant, maman n’a pas eu besoin de me dire de t’immortaliser, c’était une évidence. Les visites se sont enchaînées sans qu’une seule fois je ne me lasse de toi. Evidemment, entre toi et moi, l’été, il y a toujours ce petit problème d’allergie … au soleil. Un comble n’est-ce pas ?! Heureusement ce n’était pas bien difficile à expliquer à la pharmacienne (les boutons parlaient d’eux-mêmes) et l’aventure s’est poursuivie. Je me souviens aussi de cette chanteuse dans un bar qui seule face à son micro a bien compris que nous étions français et s’est mise à chanter La Vie en Rose (et Frère Jacques mais là c’est tout de suite moins glamour). Et je n’oublie pas la nostalgie du retour, celle-là même que j’avais découverte quelques années plutôt.
Heureusement, notre prochain rendez-vous a beaucoup moins tardé. Cette fois, c’est seule que je suis venue jusqu’à toi, et ce plusieurs fois. Tu es alors devenue confidente, espérance et découverte de soi. J’ai compris tellement de choses lors de ces tête-à-tête à tes côtés. Ce sentiment de liberté, ce sentiment d’apaisement. Se sentir forte, en vie et remplie d’espoir et de projets. Rien que pour cela, Barcelone, tu seras toujours gravée en moi. Je me souviens t’avoir présentée mon nouvel amour, ne doutant pas une seconde que le déclic se ferait des deux côtés. Tu as, là encore, été le témoin d’un moment important de ma vie, nous regardant parcourir tes ruelles, s’arrêter près de l’une des scènes où se produisaient quelques artistes et tu n’as sûrement pas loupé la grosse tâche de chocolat que je m’étais faite sur le t-shirt en dévorant ma crêpe-glace près de Ste Maria …
Lorsque mes 30 ans ont approché et que les questions du style « tu veux le fêter ? » ont commencé à pointer, il était naturel que je veuille vivre ce moment près de toi. Cette fois, je ne suis pas venue seule, loin de là. Il était temps que tu connaisses le petit habitant qui avait logé presque 9 mois dans mon ventre, il était temps que tu connaisses la suite de ce que tu avais cru deviner. Par surprise, tu as connu finalement encore bien plus de monde que prévu puisque d’autres invités nous ont rejoint sans que je le sache pour fêter ce moment ensemble. Tu as vu mes larmes de joie et tu as pu mettre un visage sur le nom de personnes importantes. Et, comme un signe du destin, quelques visites ne sont pas déroulées comme prévues. Il nous faudra donc revenir pour les découvrir et tu sais quoi ? Il nous faudra revenir encore longtemps car à chaque passage, son lot de découvertes. A chaque rencontre, tu me surprends et me conquières encore plus. A chaque rendez-vous, je te vis, je te ressens et je t’aime encore plus. Tu vois Barcelone, je me souviens de tout. Cette lettre ressemblerait presque à une déclaration d’amour … Et s’en est peut-être une. Quoiqu’il en soit, Merci Barcelone, de me réserver à chaque fois de si belles surprises, d’aussi bons moments, de si belles découvertes. Notre histoire ne s’arrêtera pas là, sois en certaine …
A très vite… A.